Quand le jeune Paul-Joseph [1] Chaudy fuit son village natal de Bresse pour échapper à la mobilisation de 1815, c'est un homme plein d'expériences internationales. N'a t'il pas parcouru l'Europe avec les armées napoléoniennes et enrichi son éducation de paysan bressan de multiples observations ?
Réfugié à Pierre Bénite, à deux heures de marche au sud de Lyon, il a trouvé un emploi de jardinier dans l'une des résidences de week-end d'un riche marchant lyonnais. Il observe les pousses de cresson dans les bassins d'eau tiède d'une source comme il en a vu en Italie, il s'aperçoit que les salades sont différentes qu'en Bresse. Son employeur l'encourage à restaurer le carré médicinal mal entretenu au cours des longues années de la révolution française. Ainsi notre immigré se passionne pour l'herboristerie. Il cultive et fait des plançons de cette belle laitue de Pierre Bénite qu'il vend sur les marchés et les foires de
la région. Cette
laitue deviendra célèbre bien au-delà des horizons lyonnais.
Chaque famille bourgeoise essayait de produire dans sa propriété toutes les plantes nécessaires à son alimentation et sa santé. Depuis 1626 Paris avait son « jardin des plantes » avec près de 5000 plantes, mais il est fort possible qu'à Lyon la tradition de cultures des plantes médicinales remonte au XIème siècle. Les bourgeois lyonnais rivalisaient d'ingéniosité pour acquérir de nouvelles plantes venues du monde entier. Paul-Joseph Chaudy fit l'un de ces jardiniers qui devaient imaginer comment préserver ces précieux arrivages et comment les intégrer dans les carrés du jardin botanique de plantes médicinales de la propriété.
Il se marie en 1824 et, pour des raisons familiales il doit regagner son village natal et s'occuper de la ferme de ses beaux-parents après avoir passé une dizaine d'année à s'occuper des carrés médicinaux, carrés de senteurs et potagers aux cents légumes d'un riche bourgeois lyonnais.
Selon informations communiquées par M Jean-Paul Chaudy descendant en ligne directe de l'obtenteur.
|
Son fils Joseph-Paul [2] est bercé des histoires merveilleuses de ce qui se passe à Pierre Bénite. Dès que l'occasion lui en est donnée, à l'âge de 12 ans, il va faire son apprentissage là ou son père a pu exercer sa créativité.
Mais depuis 1834 la société lyonnaise a bien changé, c’est le temps de l’expansion industrielle : on construit la première ligne de chemin de fer en France, pour amener le charbon des mines de Saint-Étienne vers la ville de Lyon. Le marchand qui employait son père est devenu un chef d’entreprise et un inventeur. Le jeune Bressan va être immergé dans un univers scientifique bouillonnant. Il ne s’agira plus d’entretenir un jardin potager mais de suivre l’exemple de son chef et d’innover. Tout le monde fait de la recherche, et, bien sûr, il y a tous les jours de nouvelles découvertes. Avec ses copains notre Bressan fera un tas d’expériences, lui réussira à sélectionner et commercialiser une nouvelle variété de poire qui portera le nom de famille : « Chaudy », plus précisément
la
Beurré Madame
Chaudy [3], en hommage à sa maman, et sera exportée au Canada par ses amis partis peupler ces terres inhabitées. Cette poire peut grossir à l’intérieur d’une bouteille et sera conservée par de l’alcool. Cette variété de poire continue de faire la prospérité des arboriculteurs.
Joseph-Paul se marie en 1857 et s'installe à Chaponost dans la maison de ses beaux parents[4]. Aussitôt il met en pratique ses connaissances familiales en herboristerie, arboriculture de plaisance et tonnelles. De nombreuses maisons bourgeoises seront ornées de cèdres du Liban et autres arbres venus de contrées lointaines par les soins de cet arboriculteur passionné.
Dans le jardin de sa ferme des centaines de plantes serviront de plançons et de boutures. C’est là qu’il expérimentera des greffes inhabituelles tel ce prunier-abricotier, planté au milieu du poulailler qui a produit pendant 50 ans des abricots en juillet et des prunes en août !
Quand j'avais 10 ans mon arrière-grand-mère [5] aimait à expliquer à quoi servaient ces centaines de plantes gardées précieusement dans des bocaux de verre, qu'elle avait récoltées tout au long de l'année et servait en tisane pour tous les maux de
la vie. De
toute sa vie elle n'avait jamais visité le docteur, et s'en est allée à 92 ans.
Histoire contée par Jean-Paul Chaudy [6], descendant en ligne directe de Paul-Joseph et de Joseph-Paul. L’objectif étant de mémoriser l’histoire d’une famille qui a contribué à développer les plantes, arbres et herbes médicinales qui font parti de notre patrimoine régional naturel.
[1][1] Paul
Joseph Chaudy,
né le 24 janvier 1792 à St Julien sur Reyssouse, fils de
Pierre Chaudy (
1751-1794) et de Jeanne Gras. Il épouse Claudine Gamby (1805-1878) en 1824 à St Genis sur Menthon.
[2][2] Joseph-Paul Chaudy, né le 21 février 1826 à St Jean sur Veyle, fils de Paul-Joseph
[3][3] Voir sur ce site :
[4][4] Joseph-Paul épouse Virginie Guicherd le 19 mars 1857 et réside au Bourg, 200m à l’ouest de l’église de Chaponost. Il travaille comme jardinier-herboriste dans les maisons bourgeoises : chez Fichet, chez Canna de Chisy, chez Bergeron.
[5][5] Jeanne-Marie Drivet, (1871-1963) épouse de Benoît
Joseph Chaudy (
1863-1925)
[6][6] Jean-Paul, Joseph, Chaudy, né le 31 juillet 1950 à Lyon.
|